F. J. Ossang
Le dernier cinéaste Noise n’Roll
Dans un article récent (Epok, octobre 2001), et en prenant soin de mettre ce terme entre guillemets, Marc Bruimaud nommait justement les trois “ maîtres ” de l’underground : Philippe Garrel, Marcel Hanoun, F. J. Ossang. Le troisième reste encore sous-évalué, ce qui n’inquiète pas ses admirateurs habitués au principe du délai de reconnaissance, délai dont la durée s’avère toujours proportionnelle à la grandeur de l’œuvre. Ce n’en est pas moins difficile à vivre au quotidien pour le cinéaste lui-même, réduit à ne tourner un film que tous les cinq, six, sept ans. Aussi ce film rare, arraché de haute lutte à la tristesse ambiante, éclate de tant de beauté, relève d’un tel esprit de libre perfection, qu’il devient irregardable pour beaucoup, comme si des yeux accoutumés depuis toujours à la pénombre devaient soudain regarder le soleil en face (trois ans plus tard, l’auteur de ces lignes reste traumatisée par la critique deDocteur Chance dans les Cahiers du Cinéma, qui renvoyait la splendeur plastique du film au clip et à la publicité). Comme Cocteau, comme Welles, comme Pasolini, F.J. Ossang pratique toutes les formes d’images : musique (avec son groupe MKB, les Messageros Killers Boys), littérature (cf notamment son livre culte, Génération Néant), cinéma. Il feint de ne pas pratiquer la peinture et le dessin, mais il a toujours mis ses excellents opérateurs, Darius Khondji pour le Trésor des Iles Chiennes ou Rémi Chevrin pour Docteur Chance, en état de grâce, inventant des images absolument sans équivalent dans le cinéma mondial. Joe Strummer a dit de lui qu’Ossang était le seul cinéaste avec qui il retournerait immédiatement. Si ce n’était pour lui, pour Garrel, pour les Straub, Gaspar Noé ou Patricia Mazuy (les autres artistes empruntant des voies non-commerciales), on ne regretterait pas une seconde la disparition totale et définitive de l’industrie du cinéma en France. Bonnes nouvelles : il vient de publier un nouveau livre (Tasman Orient, éd. Diabase), et prépare, peut-être, un nouveau film. (N.B.)
Nicole Brenez : Tu es, avec Philippe Grandrieux, l’un des très rares cinéastes d’avant-garde à maintenir cette tradition née avec Jean Renoir et Jean Epstein où se manifestent autant de recherches sur le récit que sur la plastique, tu as toujours trouvé de nouvelles formes narratives. Tu as notamment inventé des formes temporelles complexes, subtiles, beaucoup à cause de la musique, mais en maintenant des schèmes narratifs populaires. Est-ce la poésie qui fait le lien ?
F. J. Ossang : Pour l’instant le résumé de livre gagne sur le cinéma, puisque les trois quarts des films actuels sont des adaptations littéraires au cinéma, et puis beaucoup de films actuels restent à la traîne d’une forme littéraire tout à fait conventionnelle. Donc j’ai toujours un peu maintenu la tension écriture et cinéma. Il se trouve que souvent les mots ont donné une espèce d’équivalence dans mes films, que ce soit au montage ou au filmage ou à la conception de la photographie. Quand les mots ont déchargé leur charge qualitative, on peut les enlever, car finalement qu’est-ce que le cinéma opposé à la littérature ? C’est le théâtre. Quand on dit genre populaire, est-ce que par exemple le garçon sauvage, thème de William Burroughs, est une thématique populaire ? Elle est en avance sur la réalité, on trouve des équivalences dix ans plus tard avec des gangs de gosses qui trimbalent des milliers de dollars, très cool, qui flinguent en un quart de seconde – grâce à la loi Rockfeller les trafiquants de drogues mineurs risquent assez peu d’ennuis. Donc la littérature est en avance ; et puis tous ces gangs, toute sa thématique de guerre sexuelle, ce n’est pas réservé aux scribes des bibliothèques de Babylone ! C’est vraiment une thématique populaire ; Homère est également populaire puisqu’il raconte des faits d’armes. Ensuite je pense que quand on entreprend quelque chose il faut le faire avec le plus de justesse possible, donc être attentif aux intuitions. La poésie est plutôt une relation passionnelle avec sa langue maternelle, alors qu’au contraire le cinéma est une prise de proie solaire, le cinéma, c’est les enfants du dieu soleil qui fondent sur toutes les formes de ténèbres, que la nuit et le jour mettent en scène.
NB. : Nicolas Sellem, qui t’a dédié un article dans la revue Cinéastes, m’a chargée de te poser une question : “ est-ce que vous vous rendez compte que vous êtes le dernier cinéaste rock n’roll ? ”
FJO. : J’ai beaucoup aimé le rock n’roll et j’ai beaucoup appris pour le cinéma en pratiquant le rock n’roll. Il y a la même dimension des poubelles des cultures qui fabriquent le cinéma. La force de frappe du cinéma me plaît, comme celle du rock n’roll. Le cinéma c’est la dernière chance, l’art unitaire et collectif. Le cinéma est une grande force critique des autres modes d’expression, il revisite la littérature. Je pense qu’au XXe siècle le cinéma a bouleversé la littérature, le cinéma muet a été le surgissement d’un récit par réseau, qui excède le récit séquentiel. La spécificité du cinéma n’est pas de voyager hors du temps mais de créer une espèce de dislocation entre le temps et l’espace, qui répond à l’accélération du temps dans la société. Qu’on bondisse en avant, viennent ensuite les retours arrière, sauf que la mémoire n’opère que relativement. Ce retour arrière produit une perte dans le temps et finalement la lumière demeure plus ou moins la seule à mémoriser – à créer du futur. En ce début de siècle, on dirait que les cellules s’en vont, qu’on mette la machine en arrière, il n’y a plus de mémoire réelle. Si bien qu’on attaque le passé, même le passé récent, très désarmé, ayant fait un saut dans le futur. C’est ça qu’il doit y avoir dans tous mes films, ce sentiment réel. Énormément de choses ont disparu, on a déstocké un maximum de cellules nerveuses, l’histoire est toujours celle d’une perte de mémoire colossale.
NB. : Veux-tu dire que le cinéma courant efface les choses ?
FJO. : Je ne parle pas du cinéma, je parle du monde en général. Mais le cinéma, la musique, les livres possèdent bien sûr une action annexe. La drogue aussi. Le monde-machine actuel mange du qualitatif pour ne reproduire que du quantitatif. La question du virtuel est de plus en plus présente dans le cinéma, je ne sais pas si c’est par rapport au chimique. Et curieusement, plus que jamais, je trouve que le cinéma muet reparaît dans sa grandeur. Par rapport aux films actuels c’est hallucinant, regardez des films commerciaux muets, quand on les voit avec un peu de musique, même si elle n’est pas satisfaisante, ça a une efficacité prodigieuse par rapport à toutes ces espèces de gros machins machinaux, machiniques actuels. Les Garbo muets par exemple sont étonnants.
NB. : C’est pour ça que dans beaucoup de tes films, surtout Docteur Chance, tu rends hommage à l’Aurore de Murnau ?
FJO. : Murnau, je ne comprenais pas, tout le monde le citait, on ne voyait nulle part, ni en cinémathèque, ni à la télévision. J’aimais surtout Murnau parce que c’est le contraire du cinéma d’auteur comme cinéma de la griffe, du truc, de la récurrence : chez Murnau, c’est exactement l’inverse, on assiste à une réincarnation du cinéma dans chacun de ses films. On pourrait ne pas du tout imaginer que c’est la même personne qui a signé chacun de ses films, que ce soit le traitement de la photographie, le rythme du montage, l’utilisation de machineries. C’est tout à fait prodigieux.
NB. : Tous les deux, Murnau et toi, vous êtes des ogres de l’espace. Il faut que vous dévoriez de l’espace pour pouvoir faire des images qui ressemblent à quelque chose d’idéal. Dans tes livres, romans ou chroniques et dans tes films, on est submergé par un incroyable désir de paysage.
FJO. : Ah oui, la rapacité spatiale. Je ne sais plus qui disait qu’il y a deux sortes de cinémas, le cinéma du paysage, du landscape, et le cinéma du visage. Beaucoup de gens tournent à Paris, mais pratiquement il n’y a pas de paysage de Paris dans tous ces films parisiens.
NB. : Du coup, on a l’impression que tu es trop grand pour le cinéma français, tu es extraterritorial.
FJO. : Ce qui m’a toujours plu dans le cinéma c’est Babel, Babylone. C’est toujours une chose primitive, pas de naïveté, on peut montrer des films presque partout et bizarrement des films en traduction simultanée, donc plus difficiles à percevoir – mais qui sont parfois mieux saisis par ce public lointain. D’un autre côté, il existe une espèce d’idéologie de l’extrême centre qui sévit dans nos zones urbaines, de sorte que tout ce qui était dans la dépense n’était plus accessible d’un seul coup, à cause d’un verrouillage préparatoire. Enfin, je me suis toujours défini comme cinéaste débutant puisque j’ai fait trois premiers films, et donc je vais attaquer mon premier deuxième film, ou mon quatrième premier, je ne sais pas exactement. Donc je parle difficilement avec autorité de tout ça.
NB. : Tes films sont splendides, ils irradient de beauté. Pourquoi ne rencontrent-ils pas d’adhésion immédiate ici ? Je pense que c’est en grande partie à cause de ton économie narrative, la façon dont le récit ne gère pas des péripéties comme font les films ordinaires, mais déploie des situations visuelles, comme chez Epstein, Garrel ou Grandrieux. Par exemple, plutôt que la poursuite ou la course, tu vas filmer le monde qu’elle engendre et tu vas faire dix plans pour montrer la variation des couleurs et des vitesses. Est-ce une chose délibérée ? Est-ce que c’est ton instinct ? Est-ce pour ça que tu fais des films ? Ou est-ce que pour toi c’est une difficulté ?
FJO. : Pas uniquement, car finalement il s’agit d’un rapport de forces, parce que je pense qu’entre la nature et l’homme c’est toujours la guerre. Le vrai film d’horreur c’est la prise de pouvoir de la nature sur l’homme. Puis le décor est la mémoire, c’est l’une des choses qui donne le passé. On sera de plus en plus sensible à la lumière. C’est étonnant comme, par exemple en architecture depuis un certain nombre d’années, on entre dans un monde mazdéen. On ne construit plus que des blocs de glace ou de lumière, qui est la maîtresse des espaces. Mais il arrive aussi que les immeubles ressemblent à des circuits imprimés ou à des codes-barres. On en voit de plus en plus dans les sociétés de masse.
NB. : Certaines choses sont structurantes chez toi, par exemple le sens de la fable ou du slogan. Quel que soit le récit traité, il passe par l’amour des mots, donc par la formule, le carton, le poème.
FJO. : Oui, il y a l’amour des mots mais c’est le contraire de l’usage du dialogue, fondamentalement mes films sont peu bavards. Les trois quarts des films n’arrêtent pas de baratiner, les trois quarts des films français sont des films à dialogues et on trafique ensuite un peu l’image. Actuellement on cherche le gène du langage. Ce que j’aime dans un film c’est convoquer des expériences différentes, qu’il y ait un échange. Travailler avec un scénariste ou un dialoguiste pourrait m’intéresser, quitte à ne pas retenir, mais il faut des attaques multiples…
NB. : Tu as écrit seul tous tes scénario ?
FJO. : Oui. J’ai tenté quelquefois de collaborer mais pour l’instant ça ne m’a jamais rien apporté. Ce qui est dommage, c’est qu’il n’y a plus de mouvements. C’est bien qu’il y ait une agitation, comme des mouvements en musique, des points de choc, des rencontres. Le drame du cinéma se réduit de plus en plus au niveau des faisceaux d’action. Il y a trente ans, beaucoup de gens cohabitaient dans le cinéma français, il y avait une extraordinaire variété, les producteurs étaient beaucoup plus ouverts, c’était vraiment des artisans. Pierre Richard pouvait mettre de l’argent dans un film de Resnais. Il y avait une diversité des effectifs français. Aujourd’hui, les Américains vont de Matrix à Warhol, en passant par Cassavetes, Jarmusch, Fight Club, – il existe une plus grande diversité. Et de la même façon, les inventeurs de l’écriture de cinéma ont pu venir aussi bien de la chorégraphie, du reportage de guerre, de l’abattage feuilletonesque, de la poésie, de la musique ou du music-hall comme Tati. Ils ont fait des films, trouvé leur langage – ont raté ou réussi. Tati est un des plus grands de la deuxième partie du XXe siècle.
NB. : Je poursuis ma recherche des traits caractéristiques de ton écriture : je trouve que tes personnages sont toujours des archétypes. Le mot te convient-il ?
FJO. : Oui ; il faut utiliser l’archétype, le totem, dans le cinéma. Ce qui m’a excité dans le cinéma, c’est de trouver ce truc mondial. De pouvoir tenter ma chance du désert d’Atacama aux Côtes d’Armor, c’est pouvoir atterrir au Kazakhstan, ou en Argentine, ce qui est fabuleux, ça c’est vraiment un réalisme actuel. Or partout c’est toujours les mêmes revendications, suite du nationalisme, post-marxisme, etc… Seul l’Islam fait un trou.
NB. : Ton principe alors consiste à mettre en pratique l’idéal universaliste du cinéma muet ?
FJO. : Le cinéma comme art du geste est extrêmement intéressant. Aujourd’hui il n’y a plus de gestes, les gens marchent n’importent comment, la plupart ne font plus rien. Ils passent leur temps à taper sur un ordinateur, que ce soit dans une pharmacie, dans une usine, dans un bureau, chez un écrivain… Le tertiaire a tout envahi, il n’y a plus de geste que bureaucratique.
NB. : Un texte de Giorgio Agamben dit en effet : le XXe siècle est l’histoire de la perte du geste. Ton idée serait de rétablir des gestes épiques dans la culture visuelle ?
FJO. : Le côté artisanal du cinéma est fabuleux, tout le monde y fait des gestes indispensables et uniques. Car quoi qu’on dise, les repérages sont très importants, l’écriture est fondamentale, le costume est capital, chaque étape de fabrication est essentielle. Dans la photo, chacun fait des gestes très précis et tout le monde est important dans le cinéma ; par exemple, dans le Trésor des Iles chiennes, le type qui ventilait juste avec une planche pour répandre la fumée de plan en plan. Il suffisait qu’il soit distrait, donc un afflux de fumée trop important et crack, le plan doit être coupé. Il faut tout recommencer. Je fais du cinéma à l’ancienne, où tout le monde compte. Quand un maillon de la chaîne est absent, c’est très ennuyeux ; le type qui pousse les travellings est la prothèse du réalisateur. Le cinéma est un mode de fabrication tout à fait unique, alors que maintenant on va filmer tout et n’importe quoi – les ordinateurs qui mettent tout en mémoire et les DV enregistrent sans discontinuer. Alors que c’est justement le geste sacré du cinéma qui me plaît. Le 35mm est précieux, cher, donc tout est sous pression, tout est unique. Une des données primitives, la pellicule, disparaît ; enfin, là-dessus il suffit de lire les entretiens de Cocteau qui sont très intéressants, et Cocteau a généré Bresson, Melville. C’est lui qui a inventé le terme cinématographe.
NB. : Tu défends une culture très classique de l’épure dans le cinéma. Et Welles ?
FJO. : Oh oui, à la suite d’Eisenstein.
NB. : Il y a un côté Arkadin dans tes films.
FJO. : Arkadin est un film extraordinaire, prodigieux, car c’est le mythe. Les écoles de scénariste vont enseigner : tu dois pouvoir raconter une histoire en dix lignes. L’idéal est qu’en sortant du film un spectateur raconte à son tour l’histoire en dix lignes et son interlocuteur la raconte encore à la concierge, etc… que cette histoire de dix lignes plaise à tout le monde. Le bouche à oreille est la publicité absolue, la plus efficace. Mais quand on parle d’un film de Welles, deux personnes peuvent faire un résumé en dix lignes, mais ce sont deux résumés différents.
Propos recueillis à Paris, le 22 septembre 2001, par Nicole Brenez et Francine Lemaître.
Merci à Nicolas Sellem.
Publié dans La Gazette des scénaristes, n° 15, hiver 2001.
F.J. Ossang: The Grand Insurrectionary Style
Nicole Brenez
http://www.lolajournal.com/1/ossang.html | |
Cinematographer, writer, singer, messenger: F.J. Ossang, born in the Cantal on 7 August 1956. Practices poetry in all its forms. Subject of a retrospective at International Film Festival Rotterdam, 25 January – 5 February 2011.
He makes music – nine albums with his band MKB (Messageros Killer Boys) Fraction Provisoire; he writes prose – some twenty books, including De la destruction pure (1977),Corpus d’octobre (1980), Descente aux tombeaux (1992), Unité 101 (2006) and the emblematic Génération néant (1993); he makes films – ten movies and as many visual poems, if poetry means a violent outburst of vitality.
Ossang pretends not to concern himself with painting and drawing, but he has created sublimely beautiful tones of grey in Silencio (2007), and always gives carte blanche to his outstanding cameramen: Darius Khondji for Le trésor des îles chiennes (1990), Remi Chevrin for Docteur Chance (1997) and Gleb Teleshov for Dharma Guns (2011), making it possible for them to create radiant images without equal on any silver screen in the world. Joe Strummer said (after Docteur Chance) that Ossang is the only filmmaker he would immediately work with again. Ossang’s work belongs to the grand insurrectionary style that runs throughout the history of anti-art, from Richard Huelsenbeck to the films of Holger Meins. (1) Ossang’s aesthetic has the singular capacity of displaying his expressive, narrative and rhythmic inventions in the context of an iconography of the most popular kind – in such a way that their poetic intensity transforms archetypes (bad guys, social groups, femmes fatales, warriors) back into prototypes, and facile effigies into fascinating creatures distraught with love, emotions, flux and space. He is a great filmmaker of adventure: bold images and scenarios in the form of expressive epic poems; the psychological vicissitudes of characters who move from rapture to ecstasy until they evaporate in the upper atmosphere because they can never again descend – like, for instance, at the end of Docteur Chance.
The story does not present events in the dreary manner of the average film, but allows room for visual developments, like Jean Epstein or the Soviet masters, including the Mikhail Kalatozov of I Am Cuba (1964). Instead of showing the chase or the race, Ossang films the world that produces such velocity, plunging into the substance of colours and the experience of sensations. Whatever the story may be, it springs from a love of words: not so much the dialogue but the formulation, the insert, the slogan, the point – giving rise to the monumental handwriting that so characterises his work. | |
(1) Other publications by Ossang: Le Berlinterne (1976), Revue CEE (1977-79), Alcôve clinique (1981), L’Ode à Pronto Rushtonsky (1994), Au bord de l’aurore (1994), les 59 jours(1999), Landscape et silence (2000),Tasman Orient (2001), Ténèbre sur les planètes (2006), WS Burroughs/Formule mort (2007). Most influential MKB Fraction Provisoire albums: Terminal Toxique(1982), L’affaire des divisions Morituri(1984), Hôtel du Labrador (1988), Le Trésor des îles chiennes (soundtrack, 1991), Docteur Chance 93 (1993),Feu! (1994), Frenchies Bad Indians White Trash (1994), MKB – Live(1996), Docteur Chance (soundtrack, 1998), Baader Meinhof Wagen!(2006). For extracts from many of these works, see here. |
But, most of all, Ossang’s cinema involves bringing back epic gestures to popular visual culture, tearing things apart until they become inconceivably beautiful. In Dharma Guns(2010), he creates a poetry of the ‘final images’, fits of giddiness, psychological account-settling that invade our brains as death approaches – the gleams and flashes he has still to extract from his much-loved argentic.
Generation Nothing: On Poetry in a Control Society
The best introduction to Ossang’s spirit is the film-portrait by Gérard Courant in hisCinématon series. It is portrait 52: ‘Made in Perpignan on 10 April 1975, at three o’clock in the afternoon’. At that time, Ossang was presented as follows: ‘Profession: singer, writer, publisher’. He was living in Toulouse , where he had started the magazine CEE, and had not yet made any films. Anyone who has seen a Cinématon is familiar with the principle: a fixed camera position, one roll of film, complete freedom for the subject. Ossang chooses to move nearer and nearer to the camera and, when he shouts into it, he is so close that it seems as if he is going to swallow it, like in James Williamson’s famous film The Big Swallow (1901). He then takes hold of the camera and runs away with it, transforming Courant’s quiet dispositif into a visual and gymnastic outburst.
This gargantuan appetite for cinema also comes to the fore in his first published texts. Issue number 7 of CEE, which was published by Christian Bourgois in 1979 and whose contributors included W.S. Burroughs, Pierre Molinier, André Masson, Bernard Noël, Christian Prigent, Claude Pélieu, and a key figure in Ossang’s universe, poet Stanislas Rodanski (a meteor from the twilight days of surrealism), contains the text ‘Video Scripts and Tribal Song’, a wild mix of manifesto, diary, screenplay, meditation and pamphlet which, in retrospect, reveals itself as an aesthetic platform for his films yet to be made.
In this text we can read, with the manoeuvres of a global civil war as background music and punctuated frames as visual montage, like so many frames and future film inserts (including one borrowed from Raoul Haussmann): | | |
| Moreover, there has never been art, only an incessant war of abuses against social time, in favour of the diversity of the real. There are only – and especially – actions to liberate what is always open! | | |
Following the example of his riotous prose, Ossang’s romantic, apocalyptic punk films are part of a guerrilla ethos in which everything serves as a weapon: an exclamation mark, a capital letter, an iris, a fade out, a homage to Murnau’s Sunrise (1927), the description of an unconditional love. So many salvos in the thick, electronic fog that makes up the world. For Ossang, everything is a struggle: the raging energy of an endless and futile battle against the order of things. As soon as he embarks on directing La dernière énigme(1982), loosely based on Gianfranco Sanguinetti’s Situationist treatise On Terrorism and the State which had just been published in French, Ossang combines the strength of constructivism (poetry of the factory), Gil Wolman (a tribute to The Anticoncept) (2) and W.S. Burroughs (freedom of montage). A film has to be an attack: against common sense, against sadness, against all forms of control, such as allocation and identification. | |
(2) For the text of Wolman’s 1952 filmThe Anticoncept, see here. |
| Dada Rock ‘n’ Roll Guerrillas. The driving force of the guerrilla is the absolute rejection of a demarcated battleground. For the mental guerrilla, it is absolute rejection of any fixed cultural register. (3) | | (3) Ossang, ‘Video Scripts and Tribal Song’, CEE, no. 7 (1979). |
Some great poets, such as Epstein or José Val del Omar, were of the opinion that cinema – an intelligent machine – had the power to reveal the harmonies according to which the world is structured. In contrast, a film by Ossang the musician lays claim to chaos, intoxication, pure and inescapable disorder. He does not manage anything, especially not the emotions of some drummed-up viewer; he does not tell a story, but only shows how we are at the mercy of history, bombarding us with sensations and splendour. He styles himself like a conspiracy in which, to survive, no one should understand anything; he invents a different language and codes akin to a secret society or unflinching prisoners preparing their escape; he creates an explosion in the course of the world, an illuminated opening through which one can perhaps escape or die – or probably both at once.
Speed
In such an undertaking, speed becomes the crucial element. Here, nothing happens the way it does in the normal course of the world, nothing conforms to the usual order of things. The diction of the actors, as singular and autonomous as that invented by Robert Bresson, inclines towards the complementary and feverish register of the agitato; the gestures of the characters, whose bodies are changed by speed; the sequence of actions which, instead of quietly articulating cause and effect, are caught up in a vortex; the images’ relationship to their present which, instead of providing simple reflection, searches for the secrets of the future among earlier icons (often Expressionist), as if the truth of their collective history lies hidden in files that we know should be made public in the next century, but which by then will have probably already been falsified or destroyed.
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| Cinema is the last chance, it is unitarian and collective art. Cinema is the great critical force of other forms of expression, it reinterprets literature. I think that in the 20th Century cinema has disrupted literature, that the silent film was the upheaval of storytelling by means of a network that rises above a linear storyline. Specific to cinema is not travelling outside of time, but the creation of a kind of disruption between time and space that corresponds to the acceleration of time in society. We can jump forward and then back again, although memory only works relatively. Going back results in a loss of time, and in the end about the only thing left to remember is the light – to create a future. (4) | |
(4) Ossang, La Gazette des scénaristes, no. 15 (Winter 2001). |
Lux Fecit
F.J. Ossang, dark light of intelligence and love. His heroes are named Ezra Pound, Roger-Gilbert Lecomte, Josef von Sternberg, Orson Welles, Glauber Rocha and Georg Trakl. In passing, we also discover that, in his eyes, the French geniuses are Arthur Cravan, Jacques Vaché, Jacques Rigaut and Guy Debord. Yet it is Hegel, the great inventor of negation, who provides the formula for the vertiginous routes to the unbound embarked upon by Ossang’s characters, and for the passionate spirit that runs through this body of work: ‘Being free is nothing. Becoming free is everything’.
NOTES ON THE FILMS
La dernière énigme (The Last Enigma, 1982) In-between essay and fiction, La dernière énigme established Ossang's formal territory: a contemporary mythology. Inspired by the book On Terrorism and the State by Gianfranco Sanguinetti, it evokes visual echoes of political events, where a generation forfeits all revolutionary aspirations due to state terrorism. Shot using two cans of Kodak XX 16mm film.
Zona inquinata (1983)
La Zone: the poor, dangerous quarters of Paris (George Lacombe, 1928); the administrative zone where Orpheus looks for his lost Eurydice (Jean Cocteau, 1950);Interzone – the working title for William Burroughs’ Naked Lunch (1959). In 1983, Ossang created a synthesis of all these territories of unrest under a banner of dead colours.
L’affaire des divisions Morituri (The Case of the Morituri Divisions, 1984)
‘A story of gladiators against the background of the German question. The men sell their life rather than let themselves waste away in a territory controlled by the European middle class. One of them has become a star to the underworld, but eventually cracks up. There is but one way out: spill the beans to the press ... ’ (Ossang).Played as a futuristic epic, L’affaire des divisions Morituri concerns the rebellion brewing amongst European youth after members of the Red Army Faction (most of whom were filmmakers) died in prison. The imagery harks back to the original revolt by Spartacus, but suddenly the black and white curtain is torn down and we are faced with the naked oppression of ‘sensory deprivation’ and State crimes. A mythical soundtrack consists of musical fragments from the most radical bands of the time: MKB Fraction Provisoire, Cabaret Voltaire, Tuxedomoon, Throbbing Grisle, Lucrate Milk. An emblem of French punk cinema.
Le trésor des îles chiennes (Treasure of the Bitch Islands, 1990)
The soundtrack to Le trésor des îles chiennes has memorable songs like ‘Pièces du sommeil’, ‘Descente sur la Cisteria ’, ‘Désastre des escorte’, ‘Passe des destitués’, ‘Le chant des hyènes’ and the original ‘Soleil trahi’. They accelerate the psychological journey of characters lost in hallucinations full of intrigue. Against contemporary consumerism are posed the expressive wealth, pugnacious energy and experimental sincerity of Ossang’s island inhabitants. Against a backdrop of ash and ancient lava, they flee for the darkness in their jeeps, and perpetuate the art of drug use: a legacy from centuries of black Romanticism. This is their real treasure, gathered by poets addicted to their craft. Their arsenal is not so much Kalashnikovs but ‘le prince cutter’ (as FJ will later sing in ‘Claude Pélieu was here’). That is to say, the strength to cut beyond the dotted lines, the instinct to avoid all deterrents to abandonment in intoxication.
Docteur Chance (Doctor Chance, 1997)
Before finding several rolls of colour film from the German army and realising twenty minutes of pure chromatic genius in Ivan the Terrible (1944), Sergei Eisenstein had dedicated some pages to colour in film. In a story about fugitive lovers, Docteur Chance, the first colour film by an expert in black-and-white cinema, issues from the same experimental excitement: how do you bring a film to the level of the chromatic initiatives in painting, as in certain medieval altarpieces, engravings by William Blake or paintings by Asger Jorn? In his Notes de travail (1996), Ossang elucidates: ‘This film should have the razor-sharp and vaguely coloured purity of a poem by Georg Trakl – no to a cinema more miserable than misery, more sexual than sex, heavier than the lead it paraphrases. Detail: a black-and-white close-up doesn’t have the same effect as a close-up in colour (why?). Why do the scripts of contemporary films seem “comatised” by emanations? Defilement of colour by structures. Deterritorialisation’.
Silencio (2007)
Silencio, Vladivostok and Ciel etient!: three silver pearls that together form the Trilogie du paysage or Landscape Trilogy. The visual poem Silencio follows in the tradition of documentary elegies that began with the films of Rudy Burckhardt and Charles Sheeler. But in the era of Throbbing Gristle, poetry must measure itself against industrial disasters, invisible nuclear apocalypses, a travel report, an optical meditation, an overwhelming array of black and white tones, a love song, a progression of dim phantoms in the terrifying caverns of hope ... strike!
Vladivostok (2008)
‘Between word and worlds, teeming with mysteries’, wrote the psychedelic poet Claude Pélieu about Ossang. The fragmentary Vladivostok cultivates the wealth of such in-between places. A concentration of Ossangian poetry, the outcome of his happy collaboration with director of photography Gleb Teleschov.
Ciel étient! (Sky’s Blackout!, 2008)
Before this, Ossang films were not comparable to other films. But Ciel éteint! calls to mind early films by Philippe Garrel (Marie pour mémoire [1967], Le révélateur [1968]), closely related to anarchist filmmaker Jean-Pierre Lajournade. With the mythological everydayness of the young, destitute lovers Philémon and Baucis live in their cottage (made of reed in Ovid, made of wood in Ossang). At the end of the credits, we find the most beautiful visual declaration of love ever.
Dharma Guns (2010)
The fable: a young man – poet, scriptwriter and warrior – dies. How do you reconstruct the images in his brain? What do we see in our moment of death? Can the spirit understand the causes of death and clear a path for itself to another life? In what kind of form do these these final images manifest? Will they dazzle? A feast of lights? An invasion? As memories, hypotheses, assumptions? The magisterial expressiveness ofDharma Guns allows us to experience the impulses of optical nerves and synapses. Ossang has grafted the film onto the central nervous system, the very place where mental images are born. ‘My eyes have drunk’, we hear in this worthy treatment of Antonin Artaud’s expectations of cinema. Dharma Guns is constantly airborne, buzzing, pushing its way towards the isle of the dead. A masterpiece that slowly moves before our eyes, in the staggering slow motion of certainty, into the company of Nosferatu (1922) and Vampyr (1932). |